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Faute médicale, erreur ou aléa thérapeutique?
Quelles différences et quelles conséquences?
Lorsqu’un acte médical entraîne un résultat indésirable, il est souvent difficile pour le patient de comprendre la nature exacte de l’événement. S’agit-il d’une faute médicale, d’une erreur médicale ou d’un aléa thérapeutique ? Ces notions, bien que proches en apparence, ont des implications juridiques très différentes, notamment en matière de responsabilité et d’indemnisation.
1. L’erreur médicale : une issue défavorable sans nécessairement engager la responsabilité
L’erreur médicale désigne une décision ou un acte du professionnel de santé ayant conduit à un résultat non souhaité, tel qu’une erreur de diagnostic, un traitement inadapté ou un défaut de suivi. Il s’agit d’une erreur que tout professionnel, même compétent, peut commettre dans le cadre de son activité.En droit belge, une erreur ne constitue pas automatiquement une faute. Elle peut survenir même si le médecin a respecté les règles de l’art et les connaissances médicales disponibles au moment des faits. Ainsi, l’erreur médicale ne suffit pas, à elle seule, à engager la responsabilité du praticien.
2. La faute médicale : une erreur qui engage la responsabilité du professionnel
La faute est définie par l’article 6.6 §1er du Code civil comme un manquement à une règle légale ou à la norme générale de prudence. Elle suppose que le professionnel de santé n’a pas agi comme l’aurait fait un médecin prudent et diligent placé dans les mêmes circonstances.
Elle peut résulter d'une négligence, d'une imprudence, d'un oubli ou d'un manquement aux règles médicales.
Mais attention, une faute n'est pas automatiquement synonyme de responsabilité. Pour que la responsabilité d'un médecin soit reconnue, trois éléments doivent être réunis :
-
Une faute, qu’il s’agisse d’un acte ou d’une omission ;
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Un dommage, qu’il soit physique, psychologique ou économique ;
-
Un lien de causalité direct entre la faute et le dommage subi.
La faute à elle seule ne suffit donc pas.
La faute peut résulter de la violation d’une règle légale préexistante, comme l’obligation d’information du patient prévue par la loi du 22 août 2022. Elle peut également découler d’un manquement à la norme générale de prudence, appréciée a posteriori par le juge.
Dans ce second cas, le juge doit déterminer si le comportement du professionnel de santé était conforme à celui qu’aurait adopté un médecin raisonnable et compétent dans les mêmes circonstances.
Le juge n'est pas médecin. C'est pour cela que la plupart du temps, il désignera un expert, qui lui-même pourra s'entourer de sapiteurs, pour déterminer si le comportement du professionnel de la santé était conforme à ce qu'on pouvait attendre de quelqu'un, avec les mêmes compétences, placé dans les mêmes circonstances.
On retiendra que le juge prendra notamment en compte dans son appréciation :
- les compétences professionnelles et la profession
- les circonstances de lieu
- les circonstances de temps
- les conséquences raisonnablement prévisibles du comportement (article 6.6 §2, al.2, 1° du Code civil)
- la proportionnalité entre le risque de survenance du dommage, sa nature, son étendue, et les efforts et mesures nécessaires pour l'éviter (article 6.6 §2, al.2, 2° du Code civil)
- les données actuelles et acquises de la science (l'article 6.6 §2, al.2, 3° du Code civil fait état du critère de "l'état des techniques et des connaissances scientifiques")
- les règles de l'art et les bonnes pratiques professionnelles (article 6.6 §2, al.2, 4° du Code civil)
- les principes de bonne administration et de bonne organisation (article 6.6 §2, al.2, 5° du Code civil)
3. L’aléa thérapeutique : un accident médical sans faute
L’aléa thérapeutique, également appelé accident médical sans responsabilité, est défini par l’article 2, 7° de la loi du 31 mars 2010. Il s’agit d’un événement indésirable survenu lors d’une prestation de soins, qui ne résulte ni d’une faute du professionnel, ni de l’état du patient, mais qui entraîne un dommage qualifié d’anormal.
Le dommage est considéré comme anormal lorsqu’il n’aurait pas dû se produire, compte tenu de l’état actuel de la science, de l’état du patient et de son évolution prévisible. Il convient de noter que l’échec thérapeutique ou l’erreur non fautive de diagnostic ne sont pas assimilés à un aléa thérapeutique.
La jurisprudence précise que les deux critères d’anormalité du dommage sont alternatifs : il suffit que l’un d’eux soit rempli pour que l’on puisse conclure à l’existence d’un accident médical sans responsabilité (Bruxelles (4e ch.) 2 octobre 2018, R.G.A.R. 2020, liv. 1, n° 15645).
4. Quelles sont les conséquences juridiques ?
Lorsque l’événement est qualifié de faute médicale, et que les conditions de responsabilité sont réunies, la victime peut prétendre à une indemnisation. Celle-ci peut être obtenue par voie amiable, auprès de l’assureur du médecin ou du médecin lui-même, ou par voie judiciaire. Dans certains cas, le Fonds des Accidents Médicaux (FAM) peut également intervenir.En revanche, si l’événement est qualifié d’aléa thérapeutique, la responsabilité du professionnel ou de l’établissement de soins ne peut être engagée. Une action judiciaire en indemnisation est alors exclue. Toutefois, le FAM peut intervenir pour indemniser la victime, à condition que les critères légaux soient remplis.
5. Comment déterminer s'il s'agit d'une faute ou d'un aléa thérapeutique?
Pour déterminer si vous êtes victime d'une faute médicale ou d'un aléa thérapeutique, il est indispensable de faire appel à un médecin expert qui évaluera si un autre médecin prudent et diligent aurait agi de la même manière dans les mêmes circonstances.
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